Réflexions sur le cinéma français....

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Thorn
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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 25 Sep 2012 16:06

L’audiovisuel, territoire oublié de la décentralisation

liberation.fr - 17.09.12

Dans une déclaration récente, Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, estime que la régionalisation de France 3 serait «trop coûteuse». Il est essentiel de rappeler que la production audiovisuelle et cinématographique en régions est un «territoire oublié» de la décentralisation. Les chiffres sont accablants : en 2010, 94% des rémunérations des artistes et techniciens, permanents et intermittents, de l’audiovisuel et du cinéma (source Audiens), ont été versées par des producteurs franciliens. Les chiffres plus anciens, de 2000, sont quasi identiques, la tendance à la centralisation de cette filière est d’une consternante stabilité. Ce constat est d’autant plus paradoxal que, dans la même période, les collectivités territoriales ont fortement augmenté leurs soutiens au cinéma et à l’audiovisuel. On assiste donc à une forte «captation» des financements régionaux par des acteurs économiques issus quasi exclusivement d’un unique territoire.

Aucune autre forme d’expression artistique n’a concentré à ce point son mode de financement et de décision : le théâtre, la danse, les musiques classiques ou actuelles, les arts visuels, l’architecture se financent de manière plus équilibrée, sur tous les territoires. Mais pour l’audiovisuel ou le cinéma, une seule région prime et tend à exclure les professionnels implantés hors d’Ile-de-France.

L’enjeu ne se limite pas à une question d’aménagement du territoire et de coût. Mais bien plus à l’enjeu central de la diversité et de la création culturelle. Une seule région ne peut suffire pour embrasser les expressions, les sensibilités, les spécificités d’un pays si divers que le nôtre. La pluralité des points de vue, l’expression de la diversité de tout un territoire sont les clefs de l’exception culturelle française.

La séquence politique qui s’ouvre avec l’élection de François Hollande doit être marquée, selon son programme, par «l’acte III de la décentralisation». Belle ambition ! Et comme les actes I et II sont passés à côté du cinéma et de l’audiovisuel, l’occasion est venue de s’y mettre. La ministre de la Culture s’est aussi déclaré «l’ambassadrice de la diversité» et Marylise Lebranchu, ministre chargée de la Décentralisation, estime que «la réforme de l’action publique est un chantier majeur». L’Etat dispose de moyens puissants pour mener cette décentralisation culturelle avec France Télévisions, le CNC, les contrats Etat-région et d’autres institutions relais. Les villes, les collectivités locales et territoriales sont des partenaires actifs et responsables de la politique culturelle. Elles le prouvent largement par leurs engagements dans le financement du cinéma et de l’audiovisuel.

Pour se débarrasser du «réflexe parisien», il y a donc du grain à moudre ! Seule une politique volontariste peut faire varier le curseur de la décentralisation. Côté audiovisuel, l’acteur majeur est à France Télévisions avec France 3, une «chaîne des régions» encore enfermée dans un modèle issu d’une conception du régionalisme des années Pompidou : seulement quinze heures hebdomadaires de programmes régionaux dont dix d’information et moins de 5% de ses programmes conçus et produits en régions. Il faut donc envisager une nouvelle phase de développement qui devra s’appuyer sur une véritable régionalisation de France 3 avec une politique de production et de création autonome, à la mesure de l’intense activité de création culturelle qui se développe sur tout le territoire.

Les professionnels constatent que l’ouverture des antennes régionales de FR3 au milieu des années 90 et la montée en puissance du soutien des collectivités régionales ont permis, à contre-courant, un développement du secteur audiovisuel et du cinéma «au-delà du périphérique». La création en régions compte aujourd’hui des dizaines de sociétés de production reconnues qui s’appuient sur des auteurs, des réalisateurs, des comédiens et des équipes techniques. Le potentiel régional est considérable : documentaires, films et séries d’animation, captations de spectacle, courts et longs métrages, fiction télé se tournent tous les jours sur l’ensemble des territoires. Il est donc temps de passer à un autre modèle de production qui s’enrichisse de la créativité et du savoir-faire de tous.

Nous, professionnels de l’audiovisuel et du cinéma en régions, appelons à la mise en place d’une politique active de décentralisation audiovisuelle et cinématographique de la part du CNC et de France Télévisions. Celle-ci pourra s’appuyer, entre autres, sur le développement d’une télévision publique régionale dotée de moyens de production et d’espaces de diffusion correspondant enfin à la réalité et aux richesses des territoires dans lesquels elle est implantée.

Premiers signataires : Olivier Roncin Producteur, Nantes, Estelle Robin-You Productrice, Nantes, Gilles Padovani Producteur, Rennes, Jean-François Le Corre Producteur, Rennes, Olivier Bourbeillon Producteur et réalisateur, Brest, Antoine Martin Producteur, Rouen, Alexandre Cornu Producteur, Marseille, Jérôme Duc-Maugé Producteur, Lyon, Thierry Gautier Producteur, Tours, Daniel Laclavière Producteur, Brest, Dominique Garing Producteur, Besançon, Laurent Dené et Josiane Schauner Producteurs, Strasbourg, Cécile Lestrade Productrice, Orléans.


Source :
http://www.liberation.fr/

Article original :
http://www.liberation.fr/culture/2012/0 ... ion_847448

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Thorn
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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 23 Jan 2013 22:19

La production indépendante française est à bout de souffle

lemonde.fr - 23/01/2013

Nous sommes producteurs de films et avons fait le choix de défendre un cinéma aventureux. Aujourd'hui, le cinéma français est administré par un concile de manageurs qui méprisent tout ce qui est complexe. Jamais il n'a disposé d'autant d'argent (1,13 milliard en 2011 contre 360 millions en 1994), jamais il n'a produit autant de films (207 en 2011 contre 89 en 1994) et la fréquentation bat des records.

Pourtant, jamais sa production n'aura paru aussi formatée et obnubilée par le marché. Avec une grande brutalité, ses exégètes écartent au nom du divertissement généralisé et d'une certaine vision de la rentabilité économique tous ceux dont l'entreprise est motivée par le risque artistique.


VINCENT MARAVAL, JOYEUX DÉFROQUÉ

Nous en sommes revenus à une situation pré-Nouvelle Vague, le cinéma de papa a repris le pouvoir. Vincent Maraval, joyeux défroqué, a commis, dans sa tribune (Le Monde du 29 décembre 2012), une transgression majeure : il a mis les idéologues du marché devant la réalité des faits. Oui, ceux-ci étouffent la création. Oui, nombre de films produits déshonorent le cinéma et sont des échecs industriels et, de ce fait, un scandale politique.

On serait bien en peine de citer des cinéastes français influençant de telle manière leurs pairs à l'étranger. Et si les cinéastes du monde entier nous envient, et que certains d'entre eux nous honorent même de leur présence, ce n'est pas parce que règne ici une émulation artistique intense, mais parce qu'en France il y a de l'argent pour faire du cinéma.

Spectateurs de cinéma, de télévision, internautes, contribuables, tout le monde participe au financement du cinéma français. Nous avons le devoir de nous interroger sur ce qui se produit au nom de l'exception culturelle. La tentation du déni qui a animé nombre d'intervenants depuis quelques semaines vise à protéger les rentes que le système de financement français du cinéma, prétendument "vertueux", accorde surtout à ceux-là.


SOUS-FINANCÉ ET SOUS-DIFFUSÉ

La grande angoisse du clergé du cinéma, du haut et du "milieu" comme ils se qualifient eux-mêmes, est que l'on vienne déranger l'ordre établi. Nous représentons un tiers de la production hexagonale, les films du "bas", 59 films de fiction, sont enregistrés en 2011 avec un budget inférieur à 2,5 millions d'euros.

Un petit film tel que le définit le "système" n'est pas un film à moins de 4 millions d'euros mais bien en deçà ! Le cinéma émergent, ignoré par le débat que monopolisent certains prélats, est sous-financé et sous-diffusé : désertion des financements privés, obligations d'investissements des chaînes détournées de leur esprit, part des aides publiques dans les financements divisés par deux depuis dix ans, marginalisation de l'exposition en salles, extension d'une convention collective inapplicable.

Tout converge dans le sens d'une paupérisation encore plus grande du pan le plus libre de notre cinéma.

Devra être rediscutée ou imposée une logique de redistribution : augmentation du nombre de préachats de films inédits ; définition de nouvelles clauses de diversité pour les chaînes et les financements encadrés ; plafonnement, par film, des investissements pris en compte dans les obligations ; rééquilibrage entre soutien automatique et aides sélectives du Centre national de la cinématographie... M. Maraval, encore un effort !


Signataires :
Nicolas Anthomé, Mathieu Bompoint, Aurélie Bordier, Nicolas Brévière, Emmanuel Chaumet, Sébastien de Fonséca, Guillaume de Seille, Stéphanie Douet, Christophe Gougeon
Juliette Grandmont, Céline Maugis, Christie Molia, Thomas Ordonneau, Gilles Padovani, Fabrice Préel-Cléach, Charlotte Vincent, Igor Wojtowicz sont producteurs indépendants.


Source :
http://www.lemonde.fr/

Article original :
http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 23 Jan 2013 22:22

Les acteurs français sont trop payés!

lemonde.fr - 28/12/12

L'année du cinéma français est un désastre. Pendant que Gérard Depardieu fait l'actualité et que les ministres rivalisent d'esprit pour en faire le scandale du moment et dénoncer son exil fiscal à 2 kilomètres de la frontière d'un pays dont il ne se sent "plus faire partie", personne ne parle du cinéma français. Or tous les films français de 2012 dits importants se sont "plantés", perdant des millions d'euros : Les Seigneurs, Astérix, Pamela Rose, Le Marsupilami, Stars 80, Bowling, Populaire, La vérité si je mens 3, etc.

Pas un film, sauf peut-être Le Prénom, pour gommer ce que toute la profession sait pertinemment, mais tente de garder secret : le cinéma français repose sur une économie de plus en plus subventionnée. Même ses plus gros succès commerciaux perdent de l'argent.


EXCEPTION CULTURELLE

Constat unanime : les films sont trop chers. Après les films des studios américains, la France détient le record du monde du coût moyen de production : 5,4 millions d'euros, alors que le coût moyen d'un film indépendant américain tourne autour de 3 millions d'euros. Ce coût moyen ne baisse jamais, alors qu'il y a toujours plus de films produits, que le marché de la salle stagne, que la vidéo s'écroule et que les audiences du cinéma à la télévision sont en perpétuel déclin face à la télé-réalité et aux séries.

Mais alors, pourquoi s'émouvoir ainsi sur le cas Depardieu ? Pourquoi ce déchaînement médiatique et politique ? Sans doute parce qu'il y a là un vrai scandale d'ordre plus général. On le sait, l'époque aime les cas particuliers. Mais le scandale qui nous intéresse les dépasse largement. Il est d'ordre systémique. On peut s'étonner de voir nos ministres s'en laver les mains.

Pourquoi si peu de voix s'en saisissent-elles dans le milieu du cinéma ? Parce qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil ? Que Delon, Hallyday et autres agissent de même depuis longtemps ? Dany Boon, par exemple, ce chantre de la France profonde qui vit à Los Angeles, obtient des sommes qui laissent un Gérard Depardieu sur le carreau, ratatiné. 3, 5 millions d'euros pour Le Plan parfait, dont les entrées ne seront pas suffisantes pour payer son salaire ! Un million pour quelques minutes dans Astérix, film qui fait exploser le ratio entrées/cachet/minute à l'écran...


MIRACLE DU SYSTÈME DE FINANCEMENT

Malgré ses récents échecs, grâce au miracle du système de financement du cinéma français, Dany Boon s'apprête aujourd'hui à attaquer son nouveau film, Hypercondriaque, pour lequel on parle d'une somme proche de 10 millions d'euros. Ce texte ne se transformera pas en lettre de dénonciation, je ne nommerai que ceux qui ont fait leur coming out fiscal. Mais ils sont nombreux, qui se disent à gauche, dénoncent les injustices, mais au fond n'en voient qu'une seule : leur niveau d'imposition.

Mais pourquoi, au fond, les acteurs seraient-ils pires que les sportifs ? Parce que leur carrière est potentiellement plus longue ? Non, le seul scandale, le voilà : les acteurs français sont riches de l'argent public et du système qui protège l'exception culturelle. A part une vingtaine d'acteurs aux Etats-Unis et un ou deux en Chine, le salaire de nos stars, et encore plus le salaire de nos moins stars, constitue la vraie exception culturelle aujourd'hui.

Pourquoi est-ce qu'un acteur français de renom, qu'il se nomme Vincent Cassel, Jean Reno, Marion Cotillard, Gad Elmaleh, Guillaume Canet, Audrey Tautou, Léa Seydoux, touche pour un film français - au marché limité à nos frontières - des cachets allant de 500 000 à 2 millions d'euros, alors que, dès qu'il tourne dans un film américain, dont le marché est mondial, il se contente de 50 000 à 200 000 euros ? Pourquoi, par exemple, Vincent Cassel tourne-t-il dans Black Swan (226 millions d'euros de recettes monde) pour 226 000 euros et dans Mesrine (22,6 millions d'euros de recettes monde) pour 1,5 million d'euros ? Dix fois moins de recettes, cinq fois plus de salaire, telle est l'économie du cinéma français.

Savez-vous que Benicio Del Toro, pour le Che, a touché moins que François-Xavier Demaison dans n'importe lequel des films dans lesquels il a joué ? Que Marilou Berry, dans Croisière, touche trois fois plus que Joaquin Phoenix dans le prochain James Gray ? Que Philippe Lioret touche deux fois plus que Steven Soderbergh et sept fois plus que James Gray ou Darren Aronofsky ? Pourquoi s'en priveraient-ils ?

Et pourquoi Depardieu est-il le salaud ? Lui qui fait Mammuth gratuitement pour permettre au film d'exister et propose de faire la même chose pour DSK de Ferrara. Pourquoi Vincent Cassel, qui met son argent et son énergie au service de jeunes talents comme Kim Chapiron ou Romain Gavras, serait-il plus coupable que le système ?


DES ÉCHECS ÉCONOMIQUES

L'explication, jamais le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) ni la ministre ne l'ont fournie : la subvention directe dont jouit le cinéma français (chaînes publiques, avances sur recettes, aides régionales), mais surtout la subvention indirecte (l'obligation d'investissement des chaînes privées). Voilà pourquoi tous les échecs de 2012 mentionnés ci-dessus n'ont guère ému la profession, et que ceux-ci n'ont pas suscité d'articles de fond. Et pourtant, rendez-vous compte ! Sur le top 10 des films d'une économie qui en concerne 220, un seul est rentable !

Il est vrai, les scores de ces films ne sont pas honteux : 6 millions d'entrées pour le Marsupilami, 4 millions pour Astérix ou La Vérité si je mens, 3 millions pour Les Seigneurs, 2 millions pour Stars 80, 1 million pour Populaire... Ils sont même bons dans l'absolu, et il est probable que le niveau d'entrées 2012 ne va guère baisser par rapport à 2011, la fameuse année d'Intouchables. Mais ce sont tous des échecs économiques parce qu'ils coûtent beaucoup trop cher.

Astérix, à 60 millions d'euros, a le même budget qu'un film de Tim Burton. Voilà qui laisse rêveur... Stars 80 plus cher que The Hangover ou Ted. Ça laisse pantois... Et tout autant Populaire, plus cher que Black Swan ou Le Discours d'un roi ! La responsabilité de cette situation n'est pas à chercher, hélas ! dans une supposée incompétence de nos producteurs, mais dans ce que les Américains appellent le "above the line " ("la surévaluation"), les cachets qui font de nos talents, inconnus au-delà de nos frontières, les mieux payés du monde.

Mais à quoi servent de tels cachets si les résultats ne se matérialisent pas en recettes économiques ? En réalité, ils permettent d'obtenir le financement des télévisions. Black Swan se finance sur le marché. Il n'y a dans son financement aucune obligation, aucune subvention, l'acteur est donc payé pour ce qu'il vaut, 226 000 euros. Mesrine, en revanche, a besoin de ce financement pour exister, ce qui explique que l'acteur se retrouve avec un pouvoir de vie ou de mort sur le projet, et ce en fonction de sa valeur télé. Il réclame donc sa part du gâteau. Lui sera payé entre 1 et 1,5 million d'euros. Qui peut l'en blâmer ? Cela devrait vouloir dire qu'il touche là le fruit de sa notoriété sur le marché télévisuel. Sauf que le cinéma enregistre des contre-performances à la télévision. Sans les obligations légales issues de notre système public de financement, il y a bien longtemps que "Les Experts" et la "Star Ac" auraient réduit à néant les cases "Cinéma" des chaînes de télévision.


JETÉ À LA VINDICTE PUBLIQUE

Est-ce à l'individu qu'il revient de "réguler" le système sous peine d'être jeté à la vindicte publique comme Gérard Depardieu ou est-ce au CNC et à son ministère de tutelle de le faire ? A l'heure où François Hollande veut que les patrons des grandes entreprises publiques limitent leurs salaires, laissera-t-on les "hauts salaires" du cinéma gagner plus qu'ils ne valent, et ce grâce à de l'argent public, à un système unique, exceptionnel de financement ? Est-il normal qu'un Daniel Auteuil, dont les quatre derniers films représentent des échecs financiers de taille, continue à toucher des cachets de 1,5 million d'euros sur des films coproduits par France Télévisions ?

Le fameux système d'aide du cinéma français ne profite qu'à une minorité de parvenus. Mais jamais cela ne provoquera un scandale aussi retentissant que l'exil fiscal de Gérard Depardieu. Les miettes que laisse ce système réduisent en effet au silence ceux dont le rôle serait de pousser l'analyse.

Une idée simple : limitons à 400 000 euros par acteur - et peut-être un peu plus pour un réalisateur -, assorti d'un intéressement obligatoire sur le succès du film, le montant des cachets qui qualifient un film dans les obligations légales d'investissement des chaînes de télévision. Qu'on laisse à Dany Boon un cachet de 10 millions d'euros, si telle est véritablement sa valeur marchande. Mais alors que ce soit en dehors de ces obligations. Et redonnons ainsi à notre système unique et envié sa vertu en éliminant ses vices.


Par Vincent Maraval, distributeur et producteur, fondateur de la société de distribution de films Wild Bunch


Source :
http://www.lemonde.fr/

Article original :
http://www.lemonde.fr/a-la-une/article/ ... _3208.html

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 09 Fév 2013 11:08

Eloge d’un cinéma pauvre, politique et populaire (Comolli)

cinemadocumentaire.wordpress.com / 06.02.2013

Rencontrer Jean-Louis Comolli à son domicile parisien, c’est un peu comme pousser la porte d’un jardin d’hiver. C’est une aire de repos, un oasis de sérénité dans le brouhaha du monde. Salvatrice et apaisante clairière à l’heure où les professionnels du cinéma s’écharpent dans une forêt de critiques et d’invectives quant au financement des films en France.

Que répondre alors à Vincent Maraval depuis que celui-ci a bien secoué le petit monde du 7ème Art à l’occasion d’une tribune parue dans le journal Le Monde le 29 décembre 2012 ? Rien. Rien au producteur de Wild Bunch en particulier. Mais quelque chose tout de même. Une proposition forte et hétérodoxe : l’éloge d’un cinéma pauvre.

N’ayons pas peur de ce mot, prévient tout de suite Jean-Louis Comolli : « Le cinéma est trop cher, il se perd dans une disproportion grandissante entre le coût des films et les possibilités de leurs recettes ». En clair, rien, d’un point de vue économique, ne justifie la hausse des budgets de production quand les publics restent quantitativement les mêmes (un peu moins de 200 millions d’entrées en moyenne sur les 10 dernières années).

Un cinéma pauvre, cela induit que l’on ne compte plus le temps – donnée essentielle d’un travail documentaire sérieux. On ne le compte plus, ou alors plus de la même manière. Pourquoi ne pas privilégier des rémunérations au forfait plutôt qu’en fonction du nombre d’heures travaillées ? Payer moins, mais payer plus longtemps, en somme. Joli slogan politique… Développer des formes coopératives, inventer des modes d’intéressement, penser le salariat dans une veine plus participative. Il s’agit finalement d’en finir avec les positions syndicales trop marquées : quand on réalise un film, cherche t-on des employés ou des partenaires ?

Cela suppose sans doute de repenser la polyvalence des « techniciens ». Il n’est pas incompatible de travailler sur le son d’un film ET de déplacer des projecteurs. L’hyper-spécialisation historique à l’œuvre dans l’industrie du cinéma tend à redoubler les personnels sur des mêmes postes. L’équation économique est alors impossible. Heureusement, de jeunes audacieux tendent à briser les codes dépassés et les frontières révolues.

La chance de ces films dits « pauvres », c’est que « le risque financier n’est plus le même », explique Jean-Louis Comolli. Dès lors, de nouvelles pistes de diffusion s’ouvrent. Des ventes à long terme, via DVD ou VOD. D’autres déploiements sont possibles, notamment sur le web, dans un marché parallèle, ou un « para-marché ». « Le marché classique n’est plus à même de faire vivre les films ; pire, il les tue. L’emballement s’est généralisé ; les films ne restent pas trois jours en salles, et les sorties ne servent souvent qu’à produire de la publicité autour d’un long métrage (sortie = article, bon ou mauvais mais qu’importe, dans la presse). Cette économie est absurde : les films ne sont plus exposés, ils sont liquidés, ne disposant de pas plus de trois secondes pour respirer ».

Alors, bien sûr, il existe des exceptions. Des documentaires résistent en salles, soutenus par un fort bouche-à-oreille ou par des réseaux associatifs, mais ce ne sont que des exceptions (voir Tous au Larzac en 2012, ou Searching for Sugar Man début 2013). Et la filière ne peut pas se contenter d’exceptions.

Quid de la télévision, alors ? Elle est certes source de financements aux yeux de Jean-Louis Comolli, mais « elle est aussi source de banalisation et de formatage ». « La télévision coûte cher en conformisme et en médiocrité ». Là aussi, il existe des exceptions, mais que reste t-il d’un film deux ans après sa diffusion ? « La télévision, de toutes façons, n’a que deux fonctions : le contrôle du monde et le modelage de la norme ».

Pour un cinéma politique ET populaire

Le cinéma devrait être gratuit, et obligatoire. Tel est le credo de Jean-Louis Comolli. « En Art, le prix n’a pas de sens. Combien vaut le Moïse de Michel Ange ? Quel prix pour un film de Tarkovski ». L’Art n’a pas de prix, et il devrait du coup trouver encore davantage les moyens de son développement du côté des galeries, du mécénat, des subventions locales, régionales, nationales, et bien sûr du crowdfunding.

C’est une conception d’un cinéma très politique que défend ici l’ancien rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma. Un cinéma politique d’ailleurs, dont le contenu n’est pas forcément politique, mais qui considère le spectateur comme politique. « Là où le cinéma est politique, c’est quand il permet au spectateur de se constituer en force critique. Le travail consiste à lui poser problème, à le mettre mal à l’aise, en péril. Un documentaire politique ne laisse pas le spectateur indemne, il va à l’encontre du maintien de l’ordre des choses ». Des exemples ? Dans la chambre de Vanda, A l’Ouest des rails, « tous les films qui mettent en question la place du spectateur sont politiques ».

C’est aussi une conception d’un cinéma très populaire que construit Jean-Louis Comolli. « Le cinéma est un art populaire qui ne rencontre pas toujours son public. Il désire des millions de spectateurs, et c’est ce désir qui constitue sa part populaire. Un film populaire ne se juge pas au nombre de spectateurs qui l’auront vu, mai au nombre de spectateurs auxquels il s’adresse ». Se placer du côté du peuple, et du populaire, c’est fuir la logique comptable des banquiers. Il faut récupérer ce mot à l’ennemi : « Populaire » ne veut pas dire « grand public » ou « 3 millions d’entrées ». C’est une qualité qui est visée, non une quantité. Les films portés par le marché qui ont du succès ne sont pas tous populaires. Le marché, d’ailleurs, fonctionne pour ne pas marcher : il empêche que les films et les spectateurs se rencontrent. C’est ce qu’explique Jean-Louis Comolli : le marché entretient des barrières commerciales, des inégalités d’accès aux films, nourrit des problèmes de diffusion et de distribution. Or, être populaire, c’est avoir le souci de s’ouvrir à tous. (voir le festival Pointdoc sur Internet, par exemple).

Le cinéma, d’ailleurs a commencé à être populaire avec Charlot, rappelle le théoricien du cinéma. La vie à l’écran et la vie dans la rue se ressemblaient. Dans la salle, les dominés se réappropriaient une possibilité de réparer les injustices, de réinterpréter le monde. L’univers porté à l’écran était meilleur que celui présent à la sortie de la salle. Un univers plus simple, plus lisible, avec des causes claires et des conséquences bien identifiées, qui met en doute en même temps qu’il met en suspens le monde réel. Au cinéma, il y a une suspension des choses qui les rendent réversibles. « Le spectateur est dans une position critique par rapport au monde réel. L’usine à rêves va contre l’usine sans rêve. Le pouvoir de transformation du cinéma, sa fertilité sociale, réside dans sa faculté de désaliénation. Un film ouvre les portes de l’imaginaire, et donc du possible ». Le cinéma, s’il n’a pas forcément vocation à structurer des prises de conscience politique et militante, demeure un accoucheur de la part de fiction qui sommeille en nous. « C’est la jouissance du spectateur : mettre en doute la réalité des choses qui ne sont pas tout à fait ce qu’elles sont, et donc, potentiellement, les transformer ».

Plus encore en documentaire qu’en fiction, nous interrogeons la réalité de ce qu’il nous est montré dans un film. On adhère volontairement à un film de fiction – « suspension of disbelief » oblige. Ce n’est pas tout à fait le cas avec l’art qui nous intéresse ici…

« La croyance du spectateur de cinéma n’est jamais fanatique ou absolue. Il se pose des questions sur le pourquoi du comment. Ce travail du doute, qui nourrit la croyance, la perfore et la rend friable, rend la relativité des choses perceptibles. Là réside le début de la pensée critique ».

Un cinéma pauvre, donc, pour enrichir le spectateur de sensations ou d’idées nouvelles, qui pourra alors mettre en cause une vision univoque du monde – ainsi que l’hégémonie de l’industrie cinématographique. La boucle est bouclée.

Par Cédric MAL


Source :
http://cinemadocumentaire.wordpress.com/

Article original :
http://cinemadocumentaire.wordpress.com ... s-comolli/

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 21 Mar 2013 19:17

Les films artisanaux sont menacés par une convention collective inadaptée

Le Monde.fr - 23.01.2013

Une convention collective du cinéma est en négociation. Ceux qui l'approuvent ne s'aperçoivent pas qu'ils scient la branche sur laquelle ils sont assis... Il y aurait moins de films, moins de semaines de tournage, moins d'ouvertures de droit à l'intermittence, moins de fabrication en France, moins d'emplois donc. Ils soutiennent cette convention collective car c'est une idée qui appartient au mouvement ouvrier et qui, par là même, semble être toujours de son côté.

Pourtant s'ils allaient y regarder de plus près, ils verraient que seuls, je dis bien seuls, Pathé, Gaumont, UGC et MK2 veulent la signer. Cela déjà devrait leur paraître étrange. Ces quatre grands groupes qui sont exploitants, distributeurs et producteurs appliquent déjà le contenu de la convention. Mais quels sont ceux d'entre nous qui ont travaillé avec eux ? Ils produisent moins de 10 % du cinéma français. Le cinéma français s'écrit de deux manières, artisanale et industrielle, cinéma d'auteur et cinéma commercial... C'est aller vite mais il s'agit d'éclaircir le débat.

Ces deux cinémas ne s'opposent pas, ils se juxtaposent. Leur vitalité respective est la garantie de la pérennité du cinéma français. Des ponts existent entre les deux, pour les acteurs comme pour les techniciens. Ils ne sont cependant pas si fréquents. On peut parler de deux mondes séparés par une frontière qui échappe parfois à la surveillance du " marché ". Le cinéma industriel a beaucoup plus de succès sur tous les supports que le cinéma artisanal. Ce sont deux économies et deux visées différentes.


Appauvrissement de la représentation de notre époque

Les obligations proposées par la convention collective, grille des salaires, heures supplémentaires, heures de nuit, ne changeraient rien aux films, disons de plus de 3,5 millions d'euros "sonnant et trébuchant". Les films qui ne disposent pas de cette somme devront réduire le temps de travail, durcir la cadence de ce même travail, supprimer quelques postes, peut-être même tourner quelques scènes ailleurs qu'en France, et, à l'extrême, renoncer au film si son exigence artistique, dans ces conditions drastiques, est menacé. D'après les estimations une soixantaine de films ne pourraient pas se faire. Avec les conséquences que cela entrainerait aussi du point de vue de la liberté et de la diversité d'expression, de l'appauvrissement de la représentation de notre époque.

Les projets les plus pauvres, les débutants verront aussi la porte d'entrée du cinéma devenir de plus en plus étroite. Car bien sur la convention n'augmentera pas les sources de financement qui, prenons y garde, sont aujourd'hui de plus en plus menacées. Appliquer un droit égal à des situations inégales est le comble de la démocratie formelle qui devient une forme de légitimation d'une injustice. La justice, au contraire, voudrait que soit proposée une convention collective à deux, voire à trois étages.

On me rétorquera que, de temps en temps, un film artisanal rencontre un succès exorbitant. C'est vrai, et cela raconte assez bien la particularité de cette industrie qui travaille pour un marché mystérieux, en grande partie indéfinissable car il dépend de la vie même de chaque spectateur. C'est pourquoi une convention collective devrait en premier lieu se préoccuper de la transparence des comptes des films, de la remontée des recettes et des conditions de l'intéressement à ces mêmes recettes lorsque la grille des salaires ne peut pas être appliquée.

Donc je persiste et je signe, avec cette convention collective mes sept premiers films n'auraient pas existé. En conséquence les dix suivants non plus. En revanche nous avons à de nombreuses reprises, dans notre société AGAT films & Cie, réparti des recettes, et pas seulement pour Marius et Jeannette (le Septième film) mais aussi pour les films de Solveig Anspach, Lucas Belvaux, Ducastel et Martineau, Jean Pierre Daroussin, Tonie Marchall, Jean Jacques Zilbermann, films qui n'auraient pas existé sans ce partage des risques et des recettes.

Certains producteurs sont malhonnêtes, certains réalisateurs aussi, certains techniciens bien sur, certains acteurs, et même certains auteurs... Mais jamais une convention collective, fut-elle celle du cinéma, ne rendra les hommes meilleurs. Quant à moi, je défends, et défendrai toujours les plus fragiles, où qu'ils soient et donc jusque dans le monde du cinéma. " Dixi et salvi animam meam ", ("J'ai parlé pour le salut de mon âme"), comme disaient les anciens.


Par Robert Guédiguian


Source :
http://www.lemonde.fr/

Article original :
http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html

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Thorn
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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 29 Mar 2013 10:10

Guillaume Canet et Maïwenn montent au front contre François Hollande

lefigaro.fr - 28.03.2013

Selon un texte de loi en vigueur le 1er juillet, les traitements des techniciens du cinéma seront réévalués. Une nouvelle convention collective qui provoque une nouvelle fronde dans le septième art français.


La productrice de Amour, Margaret Menegoz, ce jeudi matin au cinéma du Panthéon, à Paris, dénonce une décision qui va «accentuer les délocalisations de tournage».
Crédits photo : Mathieu Génon

Jeudi 28 mars, au cinéma du Panthéon, à Paris, l'heure est à la colère. Sur l'écran, est projeté un fim très court composés d'extraits de Tout ce qui brille, Radiostars, Les Kaïras, Polisse … et sur la dernière image apparaît un slogan: «Pour le gouvernement, ces films n'auraient jamais dû exister.»

«L'heure est grave, le cinéma est en danger», martèle le producteur Marc Missonnier (Astérix 4). À ses côtés, d'autres producteurs, comme Kristina Larsen ( Les Adieux à la Reine ) et Margaret Menegoz (Amour), distribuent une pétition signée par 1600 personnalités du cinéma français contre François Hollande, Michel Sapin, son ministre du Travail, et Aurélie Filipetti, ministre de la Culture. Le «générique» est impressionnant. Plus de 500 cinéastes (Guillaume Canet, Maïwenn, Gérard Jugnot, Mathieu Amalric, Olivier Assayas, Christophe Barratier, Valérie Donzelli…) et 600 producteurs comme Alain Attal (Polisse, Les Petits Mouchoirs), Éric Altmayer (OSS117), Alain Terzian, Nicolas Duval Adassovsky (Intouchables), Marianne Slot (les films de Lars von Trier) et le fameux Vincent Maraval. Pour le président de la République, présenté comme l'ami des artistes pendant la campagne électorale, le coup est dur.


Les signataires de l'accord illégitimes ?

La raison de cette colère? La décision du ministère du Travail de valider la convention collective signée par la CGT et quatre grands groupes: Pathé, Gaumont, UGC et MK2. Selon ce texte qui entrera en vigueur le 1er juillet, les techniciens seront mieux payés et un nombre minimum de postes sera imposé pour chaque tournage. A priori, rien à redire. Qu'un secteur de l'économie décide en ces temps de crise de hausses de salaire est exceptionnel. Sauf que les grands groupes signataires ne produisent que 5 % des films français. Ils ne sont donc pas jugés représentatifs par les signataires de la pétition.

«C'est un coup de force. Nous représentons 95 % de la production française, dénonce le producteur Yann Gilbert (Tout pour plaire). Nous avons pourtant négocié avec la CFDT et FO un texte complet préservant les emplois, la diversité des productions tout en améliorant les garanties sociales.» Julien Pasquier, producteur de films publicitaires, est tout aussi furieux: «Les grands groupes signataires de cette convention collective ne produisent pas de films publicitaires. Au nom de quel droit, ont-ils négocié pour notre secteur?». Quoiqu'il en soit, les pouvoirs publics ont considéré que les règles de la représentativité ont été respectées.

«Jusqu'à présent, la négociation des contrats des techniciens des films d'auteur se faisait de gré à gré, explique la productrice de Michael Haneke, Margaret Menegoz. Il n'y a jamais eu de soucis malgré des salaires inférieurs de 10 à 20 % au minimum syndical. Beaucoup de techniciens sont ravis de travailler avec des grands auteurs. Cela valorise leurs CV.»


70 films seraient condamnés à partir de juillet

Selon une étude commandée par les signataires de la pétition, la décision du gouvernement conduira à la suppression chaque année du tournage de 70 films, de 600 courts métrages et de 180 films publicitaires. Ils estiment que 20 000 emplois d'intermittents disparaîtront chaque année. «Cette décision va accentuer la délocalisation des tournages car si les acteurs doivent parler français, ce n'est pas obligatoire pour les techniciens. Or, nous sommes entourés de pays comme la Belgique, le Luxembourg où les aides aux tournages sont plus favorables», souligne encore Margaret Menegoz.

Pour Gilles Sacuto, producteur de Séraphine , «c'est tout un tissu de PME qui est en danger.» Comme les 1200 pétitionnaires, il boycotte, jusqu'à nouvel ordre, toutes les commissions professionnelles comme celle de l'avance sur recettes.

Pour les films en préparation, ce bras de fer a des conséquences immédiates. «Je suis en train de recruter les équipes pour deux films qui seront tournés cet été, explique Kristina Larsen. Je dois intégrer que la masse salariale, qui représente un tiers du budget, va gonfler de 25 %. Comme le financement n'augmente pas, je suis obligée de demander aux réalisateurs de supprimer une à deux semaines de tournage, donc de modifier les scénarios. Cela revient à couper des scènes.»

Première réponse du gouvernement: la nomination d'un médiateur, Raphaël Hadas-Lebel, conseiller d'État. Vu le dialogue de sourds entre les «petits» et les «gros» du cinéma, sa mission semble pour le moins délicate.


Source :
http://www.lefigaro.fr/

Article original :
http://www.lefigaro.fr/cinema/2013/03/2 ... llande.php
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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 29 Mar 2013 10:16

Breaking News : Le cinéma français indépendant est mort

contrepoints.org - 28.03.2013

Le coup est parti tout seul : François Hollande et le gouvernement Ayrault ont tué le cinéma indépendant.


Une ville sur roues

Quand une excellente amie productrice m'a appelé pour me lancer avec une voix paniquée "Hollande vient de flinguer le cinéma français !", l'espace d'un instant, j'ai imaginé le Président en imper mastic et chapeau mou, vidant son chargeur dans le poitrail de Catherine de Deneuve. Et puis je me suis dit qu'il y avait forcément une autre explication.

Le cinéma est une économie en soi. Une quantité impressionnante de métiers se croisent sur la production d'un film : des chauffeurs de camions et de limousines aux cuisiniers en passant par les stars, les maquilleuses, les habilleuses, les coiffeuses, les peintres, les décorateurs, les preneurs de son, les musiciens, les scénaristes, les cascadeurs, les spécialistes des effets spéciaux, les machinistes, les gardes du corps, etc. : la liste est sans fin. Un tournage est une ville qui se déplace au gré du scénario. Sans compter les investisseurs du film : les banques, les distributeurs, les chaînes de télévision, qui donnent leur avis sur tout et pleurnichent au moindre courant d'air. Ajoutez à cela le fait de gérer les hôtels, les avions, les caprices des stars, les urgences, les dépassements de coûts, et la nécessité de tenir une comptabilité au centime près de cette hydre faite de professions absolument disparates, et vous saurez pourquoi les producteurs finissent souvent gros et chauves : c'est un job de fou, difficile à tenir avec talent si vous n'êtes pas alcoolique de naissance et insomniaque par vocation.


L'autre cinéma

Mais tout cela n'est possible que s'il y a beaucoup d'argent pour produire. Quand tel n'est pas le cas, on se débrouille, on bricole, on réduit tous les frais et on paye les gens le moins possible. C'est tout à fait logique. Car une carrière dans le cinéma, comme dans tous les métiers d'art authentiques, se juge au mérite. On commence très bas, stagiaire même pas payé, mais on est fier d'être là. On montre que l'on sait se rendre utile pour être rappelé au tournage suivant. On avance pas à pas, en commençant jeune et humble, et en se glissant sur les plateaux, à porter les cafés.

Nombre de grands films à petits budgets, souvent les premiers films de futurs grands réalisateurs, ont ainsi bénéficié du bénévolat intéressé de braves jeunes gens ambitieux, de copains, de membres de la famille, rémunérés en sandwiches sous plastique et en sourires reconnaissants. On peut faire un tabac en salle avec moins de moyens qu'il n'en faut à MacGyver pour sauver une blonde à forte poitrine – ce n'est jamais de gaité de cœur, mais c'est à la portée des volontés les mieux inspirées. Le cinéma débutant, ou expérimental, ou dissident, ou simplement modeste, est le fruit du système D et du désintéressement. Et c'est tout à son honneur : on ne pourra pas lui reprocher, plus tard, de gagner beaucoup d'argent.


"Bang, Bang, Baby, You're Dead" (Bruce Springsteen)

Eh bien, Mesdames et Messieurs, Ayrault et Sapin viennent de tuer ce cinéma sans moyens. Comment ? Le plus simplement du monde. Je ne vous ferai pas ici l'offense d'entrer dans le détail : seul le résultat compte. Au terme d'une négociation légiférante comme seul l'État français sait en produire (le genre de tour de table qui ne finit jamais, avec des syndicats comme s'il en pleuvait), nos deux amis ont officialisé la création d'un SMIC par métier dans le cinéma.

Qu'est-ce que cela signifie ? Donnons la parole à un professionnel témoignant sur son wall Facebook :

Technicien pour le cinéma, c'est un boulot très précaire. J'ai été intermittent du spectacle pendant très, très longtemps, mais j'étais libre de faire les films que je voulais avec qui je voulais au prix que j'acceptais, car je considérais et je considère toujours que ma liberté n'a pas de prix. Ça, c'est terminé. Comme il sera interdit de "s'arranger" et que le risque encouru par le producteur sera fatal, il n'y aura plus de possibilités de faire le film de potes à l'arrache.

Voilà, je n'invente rien. Je me contente de vous résumer en langage humain une décision idéologique. Tout est dit : il n'y aura plus que les gros budgets, suffisants pour déclarer tout le monde au Fisc, et payer tout le monde aux néo-Smic. Attendez-vous à en bouffer, du Camping et du Turf. Attendez-vous à toujours plus de démagogie, d'inesthétisme, de copinage et de fils-de.


La fin des idéologies DTC

Il existe mille manières de commenter cette funeste loi, toutes confirmant les thèses libérales. Je vous laisse les dérouler à votre gré. L'essentiel me semble de la faire connaître autour de nous. Nous y tenions, quoi, à notre cinéma indépendant. Il va nous manquer. Quitte à le perdre, autant savoir pourquoi, et en informer nos proches. Pour ma part, je souhaite conclure sur une note fermement anti-Hollande, si vous le voulez bien. Savez-vous ce qu'a déclaré Sapin au sujet de cette Opération Anti-Système D ? "C'est la fin de la récré." Voilà. Ils ne sont pas maladroits, non, ils sont idéologues. C'est bien pire. The collectivist show must go on.


Par Pascal Avot


Source :
http://www.contrepoints.org/

Article original :
http://www.contrepoints.org/2013/03/28/ ... t-est-mort

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 22 Aoû 2013 13:54

Cinéma français, l'oligarchie des médiocres

ragemag.fr - 02/01/2013

C’est la débâcle du cinéma français. Ce que la fuite de Depardieu a camouflé, Vincent Maraval – distributeur et producteur cinéphile et couillu – se charge de nous le rappeler dans sa tribune salutaire parue dans Le Monde : nos vedettes sont trop payées. Et quand on voit qui sont les vedettes en question, on est pris de nausées. Mais comme il ne faut pas attendre de prompte réaction de la part du Ministère ou du CNC, la solution est entre les mains des apprentis cinéastes.

Il a raison Vincent Maraval, nos stars chéries sont trop payées. C’est tellement indécent qu’il propose la limitation de leur cachet à 400 000 euros par film – « et peut-être un peu plus pour un réalisateur. » C’est une proposition qui apparaît raisonnable au vu de ce qui se pratique dans nos contrées pour la poignée d’égéries qui parasitent nos écrans semaine après semaine. À ce tarif, se contenter d’un film par an ne les laisserait pas croupir dans une misère noire… mais il en va sensiblement autrement, d’autant que les starlettes en question ont un goût rance de pacotille. D’abord… D’abord il y a l’aîné, lui qu’a un gros melon. Toute une génération de grands acteurs, qu’on emploie de moins en moins ou de mal en pis, et qu’on aimerait revoir davantage dans des rôles marquants plutôt que dans des productions populardes et pisseuses qui n’ont pour seule ambition que de leur regonfler le portefeuille, à ces étoiles mourantes – Daniel, si vous nous lisez.

Et puis il y a les autres, les nouveaux (par)venus, les petites connasses poudrées qui se pavanent devant l’objectif avec le même talent qu’à la météo de Canal +, les humoristes qui troquent leurs mimiques contre des froncements de sourcils qu’ils voudraient dramatiques, les chroniqueurs en vogue qui délaissent leur plume acerbe pour les enlacements lisses de comédies navrantes… Enfin bref, Charlotte Le Bon, Nicolas Bedos, Louise Bourgoin, Gad Elmaleh, Kad Merad, Patrick Bruel, Norman Thavaud et toute leur bande de tartufes. Quand il s’agit de faire la pute, il y a du monde. Pour montrer sa belle gueule de Don Juan impertinent ou ses courbes de fausse prude dans les pages des journaux, on ne se fait pas prier. Parce qu’aujourd’hui, si l’audience est au rendez-vous dans la petite lucarne, le billet pour le grand écran est généreusement offert, un signe de plus s’il en fallait que la fornication entre cinéma et télévision roule à contresens.

Mais peut-on seulement le leur reprocher ? Bien sûr, on serait tenté d’avancer que s’ils étaient davantage préoccupés par l’amour du cinéma que par leur image et leur compte en banque, ils pourraient avoir l’humilité de s’en tenir à ce qu’ils savent faire, et réciproquement – Mélanie, plus d’album s’il vous plaît ! Mais courtisés comme ils sont, applaudis frénétiquement par les masses anonymes et flattés par des cuistres qui ne voient que leur poids en or, comment pourraient-ils s’en rendre compte ?


Le cinéma de demi-papa

producteurs, les financiers, et finalement les réalisateurs. On a fait grand cas de la prestation de Marion Cotillard dans The Dark Knight Rises, grande démonstration de médiocrité cinématographique et idéologique, dont les Français aiment à ne retenir que la mort lamentable de l’actrice. Mais un acteur peut rater une prise. La responsabilité revient au réalisateur de la garder et de considérer qu’elle a sa place dans son film. Sous l’œil de Jacques Audiard et bientôt de James Gray, en est-il de même ? Non.

Exception faite du sympathique Marsupilami d’Alain Chabat, les films dont nous parle Vincent Maraval valent-ils la peine d’être vus ? Les Seigneurs, Stars 80, la Vérité si je mens 3, Bowling, Nous York ou Populaire, et jusqu’à la Stratégie de la Poussette – aujourd’hui sur vos écrans – ne méritent pas de se déplacer (c’est-à-dire si vous espérez voir un bon film de cinéma). Ces réalisateurs qui misent sur le name dropping pour attirer les foules n’ont tout bonnement rien à montrer que de vide. La mise en scène ne présente dans tous les cas aucun intérêt et leurs histoires ont été contées mille fois, aussi mal ou bien mieux. C’est l’évidence même, si ces gens-là (producteurs, réalisateurs, acteurs) font ces films-là, ce n’est pas par amour du cinéma, c’est par amour de l’argent. Quand on aime le cinéma et qu’on n’a pas d’argent, on peut faire À bout de souffle, Eraserhead, Festen ou Pater (voire même Primer et ses 7000 dollars de budget !)… et si l’on a tout de même besoin d’argent pour les besoins de l’œuvre, on court-circuite le système et l’on fait Irréversible.

Fort de l’exemple donné par Godard et sa bande à part, qui fustigeaient dès les années 1950, depuis les pages des Cahiers, le « cinéma de papa » pratiqué par leurs aînés, trop sage et moraliste à leur goût, nous pouvons aujourd’hui reprendre le flambeau et cracher sur le cinéma de ceux qui n’ont pas l’âge d’être nos pères, mais qui ont pris possession du champ cinématographique populaire à grands coups de millions, pour remplacer l’émotion et la réflexion par le divertissement mal dégrossi, où règnent en despotes décervelants l’absence de forme et un fond souvent nauséabond.


Do it yourself

À de rares exceptions près (parmi lesquelles Gaspar Noé, Abdellatif Kechiche, HPG ou Kervern & Delépine), les découvreurs de talents et les (ré)inventeurs de formes peinent à émerger du magma imbécile qui gangrène nos salles obscures. La faute à un système de subventions par trop sclérosé qui broie les jeunes réalisateurs et les contraint à faire de drastiques concessions scénaristiques et formelles, afin de décrocher le moteur essentiel à toute production cinématographique : l’argent.

Et pourtant, à l’heure où les moyens techniques dont on dispose pour réaliser un film n’ont jamais été aussi abordables pour tout un chacun, que ne leur fait-on pas un virulent bras d’honneur en prenant les chemins de traverse ? Armé d’un appareil photo numérique au capteur suffisamment sensible, de rails de travelling, de grues et de steadicams bricolés dans une cour d’immeuble, de logiciels de postproduction obtenus par les moyens que vous savez et d’acteurs amateurs triés sur le volet, le cinéaste en herbe a tous les outils en main pour mener à bien ses ambitions. Au diable les autorisations, au diable le concours des pontes de la profession et la gloire immédiate. Reste le talent. Mais le talent, disait Brel, c’est l’envie.

Une bonne connaissance de ses outils et du cinéma lui-même, une écriture solide et des partis pris formels et narratifs originaux ne manqueront pas d’attirer l’œil sur vos films de producteurs de la trempe de Maraval. Car comme le disait si judicieusement Quentin Tarantino à qui l’on demandait la recette de son succès : « Vous n’avez qu’à faire Reservoir Dogs. » Si ce que vous avez à dire et à montrer vaut la peine de l’être, nos vedettes en toc peuvent bien bouder vos plateaux et le CNC garder ses petits sous.

« C’est pas grave, on fera le tour… »


Par Nicolas Prouillac


Source :
http://ragemag.fr/

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http://ragemag.fr/cinema-francais-oliga ... res-13884/

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 21 Oct 2013 11:11

Le cinéma français en danger

Le Monde.fr - 09.10.2013

Mme Filippetti, on nous a dit que... Grâce à notre système unique au monde, envié par tous, notre cinéma bénéficie d'un financement vertueux, égalitaire, ouvert à la découverte de nouveaux talents et à la création. Les premiers films ou les films d'auteurs indépendants sont fabriqués avec moins de 2 millions d'euros. Appelons les "PFAI-2" : (Les premiers films et films d'auteur à moins de 2 millions de budget). L'an dernier, sur 172 films produits, il y en a eu 50. Le cinéma de recherche affiche une belle santé. A Cannes l'année dernière, 6 films sur les 18 films français remarqués entraient dans cette catégorie. Comment arrive-t-on à trouver 2 millions pour un PFAI-2 ? Voici la réponse.

Pour sortir en salles, il faut un distributeur. Normalement, il paye une avance sur l'argent qu'il va gagner en salles quand le film sortira. Mais ça ne se fait plus trop parce que dans les salles de cinéma, les exploitants ne veulent pas trop faire le travail de découverte de nouveaux talents et de la création. Avec de la chance, notre PFAI-2 va sortir sur 50 salles. Donc l'avance du distributeur est, soit faible, soit inexistante. Allez, voyons large, parce que nos PFAI-2 sont formidables, disons 50 000 euros.

Pourtant, les exploitants sont incités à passer des films d'auteur grâce au système des subventions art et essai. Si une salle programme des films art et essai, il y a une grosse subvention à la clé. Mais comme 60% de tous les films sont art et essai , c'est à dire 851 films en 2012, vaut mieux programmer Woody Allen ou Tarantino. Et puis, il y en a qui n'en veulent même pas, de la subvention art et essai. Chaque semaine, ils préfèrent remplir toutes leurs salles au maximum de nouveaux films de studio. La rotation des nouveautés, c'est une des solutions les plus brillantes pour faire de l'argent dans les salles de cinéma.


Télévisions

La télévision française est le guichet de financement principal pour le cinéma car elle programme 1 817 films qui donnent lieu à 4 290 diffusions. Par an ! Quel produit d'appel ! Il y a d'abord Canal+, le grand argentier du cinéma et la clause de diversité qui concerne les films dont le budget est en dessous de 4 millions d'euros. L'année dernière, Canal+ en a préacheté 40 sur les 93 qui entraient dans ce critère, c'est beaucoup. Dans les 40, il y en a 10 proposés par les producteurs les plus riches qui s'arrangent pour fabriquer des comédies ou des polars grand public à petit budget (par exemple : Pop rédemption, Mohamed Dubois, Rue Mandar, Paris à tout prix). Il resterait 30 places ? Sauf qu'en 2012, Canal+ n'a préacheté que 3 films à moins de 2 millions dont le 43e film de Jacques Doillon et le 185e film de Jean-Luc Godard.

Notons que Canal+ aimerait beaucoup que la clause de diversité soit octroyée aux films à moins de 7 millions permettant ainsi à 70% des films d'entrer dans la très à la mode diversité. Après être passé par la case Canal+, il reste donc 47 PFAI-2 à financer. Mais le système français est bien ficelé et il reste un paquet de portes. Pas TF1, ni M6, qui ne font pas de diversité et qui, de toute façon, ne financent que très peu de films. Sur les 172 films français produits en 2012, TF1 en a préacheté 16. Et M6 12. Il y a même un film qu'ils ont préacheté tous les deux. Comme TF1 a une obligation d'investissement en fonction de son chiffre d'affaires, elle met le paquet sur chaque préachat. Même des fois, quand le film n'est pas assez cher, elle demande au producteur d'augmenter son budget. Il y aurait bien Orange Cinéma Séries mais comme ils ont un deal via Orange Cinéma avec Mars Distribution qui ne distribue que des gros films, ils n'ont pris l'an dernier qu' 1 PFAI-2. Il reste donc à 46 PFAI-2 sans tv.

La TNT ? Elle diffuse plus de 900 films par an. Sauf qu'elle n'a effectué que 19 préachats en 2012. Et puis comme ce sont des filiales des grosses chaines, aucun des préachats n'a été fait sans apport au préalable. Heureusement pour la création cinématographique et les premiers films, il y a le service public ! Arte est par définition LA chaîne des films de création. Recordman du nombre de films diffusés par an avec 378 films. En 2012, Arte a financé 4 films majoritaires français en dessous de 4,2 millions qui ont également été financés par Canal+. Et aucun film de réalisateur français en dessous de 2 millions. On garde espoir pour obtenir le Graal : le seul préachat sur film en montage du PAF.

Il y aurait bien France Télévisions mais pas de préachat dans un premier film d'auteur en 2012. Même France 4 ! Et puis, il y a de moins en moins de place. France 2 et France 3 ont diffusé chacune 7 films inédits de moins qu'en 2011. Car les télévisions aiment bien faire des préachats à plusieurs. Comme le but c'est d'avoir les films les plus rentable, c'est la guerre avec TF1 et M6. La palme ? C'est le film de Valérie Lemercier qui a réussi le tour de force d'avoir 6 chaînes de télévision en préachat. C+, Ciné+, France 2, France 4, M6 et W9. Facile d'arriver à 15 millions de budget.

Donc, pour financer les 46 films de création, il faudra compter sans financement de la télévision ? Pas tout à fait. Heureusement, il reste une toute petite chaîne qui résiste. C'est Ciné+. En 2012, cette chaine du groupe Canal+ a préacheté 7 films en exclusivité. Disons, qu'on est très fort et qu'on a réussi à obtenir le préfinancement de Ciné+. On peut compter sur 120 000 euros – en moyenne. Notons qu'il reste 39 films sans financement de la télévision.

Maintenant qu'on a fait le tour, on va profiter du formidable système français et aller chercher les autres financements.


Les SOFICA

Il y a les SOFICA (une niche fiscale tournée vers le cinéma) mais elles n'ont pas de véritable clause de diversité. Elles préfèrent mettre beaucoup d'argent sur les gros films. L'argent de la SOFICA, c'est une avance qui doit être remboursée par les recettes en salles ou une vente à la télévision. Heureusement, on a la chance de ne pas avoir de télévision en préfinancement. Donc on pourra vendre le film à bas prix à une chaine une fois qu'il sera fini. Et on pourra rembourser la SOFICA. Allez, on a réussi à avoir 80 000 euros d'une SOFICA. On est à 250 000. C'est comme si les SOFICA remplaçaient le préachat d'une télévision alors ? Et oui. C'est ça. Il y a l'aide des régions. C'est un sacré coup de main. Une région met jusqu'à 200 000 euros par film à condition que le tournage se déroule chez elle. Et pour une fois, c'est très ouvert aux PFAI-2. Donc, on est à 450 000.


Avance sur recette

Bien sûr, il y a l'avance sur recette du Centre national du cinéma, on peut avoir jusqu'à 600 000 euros mais il y a une règle un peu contraignante qui a décidé qu'on ne pouvait pas cumuler plus de 60% d'aide publique sur un petit film et comme on n'a que 130 000 euros de financement privé (distributeur et SOFICA), le montant de l'avance est revu à la baisse. Entre 300 et 400 c'est bien. On est à 850 000. Par contre, le gros film d'auteur d'un cinéaste en place qui a déjà les préachats des chaines et les grosses SOFICA, il a jusqu'à 650 000 euros.

Et c'est un peu pareil avec l'aide à la diversité, l'aide à la musique, l'aide à la post production Ile-de-France, ce sont des financements très accueillants pour nos PFAI-2 mais ce sont des financements... publics, donc ça bloque à cause de la règle des 60% de financement public. On peut aller jusqu'à trouver 50 000 euros. On est à 900 000.


Le crédit d'impots

Idem pour le crédit d'impôt d'ailleurs, qui est un financement public. Pour inciter à tourner en France et éviter la délocalisation des tournages, il y a le crédit d'impôt dont le montant est calculé en fonction des dépenses faites sur le territoire. Plus il y a de dépenses, plus il y a de crédit d'impôt. Pas beaucoup d'argent, c'est peu de dépenses et donc presque pas de crédit d'impôt. Ce système profite surtout aux grosses productions, répondant à la formule déjà éprouvée : on donne plus à ceux qui ont déjà beaucoup.

Donc voilà on a fait le tour. Malgré les solutions du système français vertueux, on n'a pas encore réussi à financer les 2 millions.


Vers une coproduction

Une solution pour trouver l'argent qui manque, c'est peut-être une coproduction avec un autre pays. Par exemple, avec un acteur belge, un ingénieur du son belge et pourquoi pas un scénario un peu modifié pour que l'histoire se passe un peu en Belgique et avec la post production fabriquée là-bas, on peut compter sur 230 000 euros de plus. Mais c'est de la délocalisation alors ? Heu...oui. En plus, ça tombe bien, eux, ils aiment beaucoup les films différents et novateurs.

A combien on est ? 1 130 000 euros ? Ce n'est pas 2 millions mais c'est quand même pas mal. Bon c'est vrai que les producteurs ne se payent pas de salaires, les prestataires acceptent des ristournes très significatives et les salariés, les auteurs et les réalisateurs travaillent très en dessous du tarif. Mais comme on fait de l'art, la motivation est toujours présente. Si on fait le calcul, il manque donc 900 000 euros par film pour arriver à un budget de 2 millions, montant indispensable pour que les nouveaux talents puissent éclore dans de bonnes conditions, pour que les techniciens gagnent bien leur vie, que les producteurs émergents puissent payer leur loyer et développer d'autres projets. Pour 46 films, ça représente 41 millions. 41 millions c'est 4% des financements disponibles pour fabriquer des films en France.

Heureusement dans notre pays, nous avons la chance d'avoir un cinéma protégé et soutenu par l'intervention publique. Ce n'est pas comme si nous nous retrouvions dans un marché non régulé comme partout ailleurs. Enfin... si on y regarde de plus près, on n'en est pas très loin, même très près de la répartition de la richesse comme partout ailleurs. En 2012, les 50 films de création et les premiers films d'auteur ont été fabriqués avec 45 millions, c'est à dire 4,5% de l'argent disponible pour les financements de films en France. Dans le même temps, les 50 films à plus de 7 millions d'euros produits par les studios et les grosses productions ont été fabriqués avec 700 millions d'euros, c'est à dire 60% des financements.

Donc, l'argent coule à flots mais n'est pas très bien réparti. Est-ce possible de prendre un peu aux gros films ? Faudrait qu'on pense à lui demander quand on la croisera, mais si ça se trouve Valérie Lemercier ne fera pas un film moins bon avec, par exemple, un million de moins. Ça lui laisse quand même 14 millions pour sa comédie familiale à Paris. Dans ce cadre vertueux, TF1 et M6 financeront plus de films en répartissant mieux leur budget cinéma. Ces films n'auront plus a aller piquer dans la clause de diversité de Canal+.

Arte prendra des films en exclusivité. France Télévisions fera un meilleur travail pour la diversité et le cinéma indépendant répondant à sa mission de service public. Le label art et essai sera réellement tourné vers les films d'auteurs français, les films seront plus visibles, les distributeurs et les SOFICA prendront plus de risques, on aura plus de financements privés, on pourra aller bénéficier des financements publics qui ont été inventés pour soutenir la création. Etc...etc... La question c'est qui ? Qui va aller voir TF1, M6 pour le leur demander a ? Qui va demander gentiment la modification du classement art et essai ? Qui va demander à France Télévisions de ne pas concentrer ses préachats ? Qui va demander à Canal+ de faire attention à sa clause de diversité ? A part le gouvernement, on ne voit pas trop. Le gouvernement a-t-il l'autorité d'imposer un fonctionnement au cinéma ? Heureusement oui, comme le prouve votre travail inépuisable pour étendre la convention collective et trouver un accord avec l'ensemble de la profession.

Madame la Ministre, la dérive mercantile de notre cinéma met en danger la qualité de l'ensemble de la production française ainsi que l'existence des films de cinéastes. Ne comptez pas sur l'autorégulation, la vertu du cinéma français doit être garantie par vos décisions. Sans création, sans renouvellement, sans nouveaux auteurs, sans votre intervention, c'est le cinéma français qui va disparaître.

Par Le 109 collectif de producteurs indépendants


Source :
http://mobile.lemonde.fr/

Article original :
http://mobile.lemonde.fr/idees/article/ ... _3232.html

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 14 Avr 2014 17:10

“Le cinéma d'auteur français ? Des gens qui ont fait trois films et ne peuvent pas payer leur loyer”

telerama.fr - 11.04.2014

Réalisateur remarqué de “La Belle Vie”, son premier film, Jean Denizot explique le chemin difficile qui lui reste à parcourir pour devenir vraiment un cinéaste.

On rencontre Jean Denizot le jour de la sortie de La Belle vie, son premier film : il est forcément inquiet d'une combinaison de salles fragile – 26 écrans – mais satisfait que la presse ait salué son film, récit d'apprentissage d'un ado dont le père a décidé de vivre en ermite, dans la montagne... Il répond sans détour à notre questionnaire « premier film » : comment devient-on cinéaste ? C'est quoi être jeune réalisateur aujourd'hui ?



Quel est votre parcours avant La Belle vie ?

J'ai étudié à Paris 8 avec des apprentis cinéastes comme Arthur Harari, Héléna Klotz, Katell Quillévéré, Lucie Borleteau. Une petite bande ! On s'est tous connus là. La moitié était en prépa Cinésup à Nantes. On a choisi Saint-Denis plutôt que de s'en croûter à Paris 1 ou Paris 3, nos profs s'appelaient Nicolas Philibert, Claire Simon, Serge Le Péron, Jean-Henri Roger, des enseignants qui étaient aussi réalisateurs. On n'a jamais perdu de vue la pratique. Pendant dix ans, on a fait des courts ensemble, même si nos cinémas sont différents.

Après la fac, j'ai un peu enseigné. J'ai fait des ateliers vidéo, animé un ciné club, j'ai aussi enseigné la culture et la communication et j'ai même travaillé chez Nicolas ! L'idée était de tenir, de faire des courts et avoir le bon projet pour passer professionnel. J'ai aussi écrit pour le cinéaste Thomas Bardinet : des longs métrages qui ne se sont pas tournés. Récemment, j'ai postulé pour intégrer l'équipe scénaristes de la troisième saison d'Ainsi soient-ils. J'ai été pris, je suis ravi : je sais que ce que j'écris sera tourné l'été prochain...

Quand on vous demande votre métier, vous répondez quoi ? Et depuis quand ?

Si on calcule mes heures, je travaille plus comme scénariste.... Donc je dis scénariste-réalisateur, parfois cinéaste, ça n'a pas d'importance. Je me souviens de la première fois où j'ai osé le dire : je préparais mon mariage dans un petit village, le secrétaire de mairie m'a demandé quelle profession marquer sur les papiers. J'ai dit : cinéaste. C'était en 2010, j'avais fait deux courts, j'écrivais mon long, et quand ça a résonné aux oreilles des gens, il y a eu un petit frisson. Parce qu'il y avait mes amis cinéastes parmi les invités. Voilà, je l'ai fait dire par quelqu'un d'autre, par le maire !

Faire son premier film aujourd'hui, c'est le bon moment ?

Est-ce que ça a jamais été le bon moment ? Peut-être dans les années 90, quand Patricia Mazuy, Arnaud Desplechin, Xavier Beauvois débutaient. Eux, ils avaient Canal +, le CNC à tous les coups ! J'ai fait un film sans chaîne et sans distributeur, donc, c'était dur. Mais je l'ai fait fait, je ne peux pas dire que c'est pas le bon moment....

La France vous donne-t-elle envie de la filmer ?

Oui dans la mesure où, filmer la France ce n'est pas forcément lui rend hommage, tourner un film patriotique. Moi je filme la France pour en faire un espace mythique, propice à raconter des histoires. Les Américains filment des lieux capables d'accueillir une histoire, des personnages, avec une synergie entre les personnages et le décor. J'essaie de faire pareil, de créer un espace mythique.

Un film fondateur de votre désir de faire du cinéma ?

Il était une fois en Amérique, de Segio Leone, par son audace narrative, sa dimension lyrique, son côté fordien. Un des films auquel je me réfère souvent, c'est La Prisonnière du désert, le plus fordien des films de John Ford, pour sa limpidité narrative.

Avez-vous trouvé votre méthode de cinéaste ?

Est-ce qu'il y a des méthodes ? Je travaille le métissage entre culture européenne et culture américaine. Je voulais que mon film ait un côté « pieds nickelés » à la Jean Renoir, et le sens du spectaculaire des films américains qui traitent les grands espaces. Ce n'est pas une méthode, c'est une proposition esthétique, qui n'est pas consubstantielle à mon cinéma : voyez comment Arnaud Desplechin ou Laurent Cantet sont travaillés par le cinéma américain... J'adapte en ce moment un roman noir américain de Thomas H. Cook.

Les bonnes et les mauvaises surprises rencontrées au cours de la fabrication de La Belle Vie ?

La confrontation au marché est une mauvaise surprise permanente ! Trouver de l'argent, un distributeur, des salles : on était sans cesse confronté à notre identité de petit film d'auteur.... Sur le tournage, tourner dans la montagne, en altitude, c'était dur : beaucoup de transport, beaucoup de fatigue. Les deux premiers jours, le scénario prévoyait du soleil, il y avait un brouillard à couper au couteau. Du coup, avec la chef-op, on a transformé les scènes, le brouillard devenait la métaphore du passé des deux jeunes héros... Finalement, c'est une bonne surprise, qui donne un caractère singulier au film. Les mauvaises surprises, il faut les transformer en bonnes, c'est ça la mise en scène.

Quelles sont vos influences ? Sont-elles uniquement cinématographiques ?

J'ai des influences littéraires fortes : Flaubert et le roman du XIXe siècle, la littérature américaine, les nouvelles d'Hemingway auxquelles je me réfère beaucoup. Du côté cinéma, une dominante franco-italienne, Rossellini, De Sica, la Nouvelle Vague. Même si c'est le cinéma américain vers lequel on tend tous. Les Américains font des films les uns derrière les autres, comme des wagons derrière une locomoitive ; chaque film n'est pas un accouchement, il ne se passe pas cinq ou six ans entre chaque film. Moi, j'ai un petit garçon, un crédit sur le dos, une femme qui gagne mal sa vie. En juin, je ne sais pas ce que je gagnerai comme argent, forcément ça inquiète... Et c'est ça le cinéma d'auteur français : des gens qui ont fait deux ou trois films et qui ne peuvent pas payer leur loyer. Mais c'est quand même le plus beau métier du monde...!

La Belle vie est-il le film dont vous rêviez ?

Pas du tout. Un premier film, c'est une somme de petits renoncements, qu'on essaye d'équilibrer par une petite somme de gains. Les comédiens, les paysages, ma rencontre avec le compositeur qui a écrit la musique du film, ce sont les gains...

Le film le plus important de ces vingt dernières années ?

C'est dur. il faudrait aller voir du côté de l'Asie. Peut-être A l'Ouest des rails, de Wang Bing, c'est une telle proposition de cinéma...

Un maître vivant ? Un maître mort ?

Le mort, c'est Jean Renoir, évidemment. Vivant ? Sidney Lumet est mort, n'est-ce pas ? Mince. alors Wong Kar Wai, Nanni Moretti, Volker Schloendorff.

Quel cinéaste serez-vous dans dix ans ?

J'espère que je serai devenu un cinéaste, que j'aurais fait plusieurs films. Ce n'est pas sûr, tout est toujours à recommencer. J'espère que je n'aurais rien lâché sur l'exigence tout en ayant gagné la confiance des financiers. Notamment pour mieux payer mes équipes. Je parle beaucoup d'argent, mais c'est le nerf de la guerre. Sur mon film, les techniciens étaient mal payés et j'en ai conçu un vrai dépit.

Propos recueillis par Aurélien Ferenczi


Source :
http://www.telerama.fr/c

Article original :
http://www.telerama.fr/cinema/le-cinema ... PswXSou.01

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 03 Mai 2014 18:40

L'apocalypse selon Kassovitz

http://plus.lapresse.ca - 01.05.14

Il n’a pas la langue dans sa poche, Mathieu Kassovitz. L’acteur et cinéaste français de 46 ans est reconnu pour ses coups de gueule. Il déclarait il y a un an que le cinéma français n’était plus excitant et qu’il n’était plus fier d’être français. Il ne semble pas avoir changé d’avis.

« Les films ne marchent plus, se désole-t-il, attablé au restaurant d’un hôtel du Vieux-Montréal. On ne peut plus faire du Costa-Gavras aujourd’hui. Il faut faire du Paul Greengrass : du spectacle avec des superstars, des armes et des explosions. Pas un petit film politique intéressant. »

L’acteur d’Amen (de Costa-Gavras) semble être resté blessé par l’expérience de L’ordre et la morale, son plus récent film (2011), qui traitait d’une intervention militaire française contre des insurgés indépendantistes en Nouvelle-Calédonie, dans les années 80.

L’œuvre, dénoncée par certains militaires et hommes politiques de l’époque, n’a pas connu le succès escompté en salle et a été snobée par la cérémonie des Césars, où Kassovitz avait été célébré, à seulement 27 ans, grâce à son film le plus marquant, La haine.

« Je n’ai pas vraiment envie de passer des années à faire un film politique qui sera démonté par des gens qui ne l’ont même pas vu, dit Kassovitz. L’ordre et la morale est, je crois, plus puissant que La haine, d’un niveau politique et social, et personne n’est allé le voir. En 20 ans, on est passé, en France, d’avoir une conscience politique à ne plus aller dans la rue. »

Dans ce contexte, on ne sent plus chez le réalisateur la flamme du cinéma. Mais une envie certaine de discuter de politique, lui qui est à Montréal cette semaine afin de faire la promotion de la série Apocalypse, la 1ère Guerre mondiale, à l’affiche à TV5 dès le 5 mai (à 21 h), dont il assure la narration.

« J’ai fait une étude… », dit-il, s’arrêtant en pleine phrase pour me demander si je travaille pour un média « sérieux ». Il veut être prudent. Pour ses prises de position et ses déclarations-chocs, il a été accusé de bien des choses en France, notamment d’antisémitisme, pour avoir cité Goebbels, à la télévision nationale, en parlant des mensonges qui, à force d’être répétés, sont pris pour des vérités.

Ce fils de déporté juif hongrois ne craint pas la controverse, ni de s’aventurer en terrain miné. Il hésite un moment, mais sans que je n’aie à lui poser la question, me parle finalement des recherches qu’il a réalisées sur le 11-Septembre, « par intérêt personnel », et qui le portent à émettre des doutes sur l’implication du gouvernement américain dans cette tragédie, qu’il décrit comme un nouveau Pearl Harbor.

« Ma théorie, c’est que dans le monde dans lequel on vit, la version du 11-Septembre telle qu’on nous l’a présentée est impossible. Im-po-ssi-ble. Il y a des gentils d’un côté et des méchants de l’autre ? Ça n’a jamais existé dans l’histoire. Ben Laden n’est pas Hitler. Ce n’est pas la même personne. »

Kassovitz regrette que l’on ne puisse débattre du 11-Septembre, en particulier en France, selon lui, sans être accusé de révisionnisme. Il dit n’accorder aucune crédibilité à la légende urbaine voulant que des Juifs aient été informés à l’avance de l’attaque sur les tours du World Trade Center. Mais certaines de ses préoccupations rejoignent celles de plusieurs adeptes de théories du complot…

« Je crois que les gens ne sont pas prêts psychologiquement à accepter qu’il y ait même 1 % de différence entre ce que l’on nous dit du 11-Septembre et la réalité, dit-il. Et pourtant, le jour même du drame, on avait déjà toutes les réponses à qui a fait quoi et comment… »

Un paranoïaque, Mathieu Kassovitz ? Certainement un sceptique doublé d’un pessimiste. « Je ne pense pas que, dans les 50 prochaines années, je vivrai sans voir des trucs absolument dramatiques. Je ne vois pas comment ça peut aller vers le bien. Mais depuis que j’ai compris ce qui s’est passé autour du 11-Septembre et comment, à travers l’histoire, le monde fonctionne, je suis beaucoup plus heureux. »

Il dit préférer la lucidité à l’ignorance. « Je préfère comprendre comment on se fait embobiner », dit-il. L’apocalypse a existé, elle a décimé des populations entières et il faut se tenir en alerte afin d’éviter qu’elle ne se reproduise, dit-il, en parlant de la série historique populaire (300 millions de spectateurs dans 165 pays pour son premier volet seulement, sur la Seconde Guerre mondiale) à laquelle il prête sa voix depuis 2009.

Paradoxalement, le narrateur de cette série documentaire aux accents pacifistes croit que l’Homme devra inévitablement payer pour ce qu’il fait subir à la planète. « Je ne suis pas contre les guerres, personnellement. Parce que de toute façon, il va falloir se débarrasser d’une partie de la population. Puisqu’on va être trop. Les choses se régulent d’une manière ou d’une autre, mais il y a des gens qui vont payer. »

Kassovitz pourfend le capitalisme, source d’inégalités (« Le capitaliste ultime, c’est le mec qui a le sourire quand il se fait pendre avec la corde qu’il a négociée au meilleur prix ! ») et multiplie les déclarations controversées sur les médias sociaux.

« Je pense que ce ne sont plus les bombes nucléaires qui gardent le monde en équilibre, dit-il. C’est YouTube. On est au courant avant même les gouvernements. On est plus informés grâce à nos comptes Twitter que les gouvernements avec la NSA. Par contre, ils ont davantage les moyens de manipuler l’information… »

Un irrécupérable cynique, Mathieu Kassovitz ? « Je n’ai pas honte de le dire, j’ai besoin de faire partie du 1 %. J’ai une famille et je ne veux plus prendre de risques. C’est bien de vouloir être un artiste, mais être l’artiste qui en arrache, ça ne m’intéresse plus. C’est une connerie. Personne n’en a rien à foutre. Tu ne peux pas changer le monde comme artiste, même si tu as du succès. Ce qui m’intéresse, c’est de protéger ma famille, et de le faire le plus vite possible ! Parce que les news m’inquiètent… » On dirait bien, oui.

Par Marc Cassivi


Source :
http://plus.lapresse.ca/

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Re: Réflexions sur le cinéma français....

Messagepar Thorn » 21 Mai 2014 10:32

Le cinéma français doit se réveiller !

telerama.fr - 20.05.2014


Photo de

Pourquoi le cinéma français, pourtant l'un des meilleurs au monde, produit-il tant de films d'une banalité confondante, de polars à la traîne et de comédies poussives ? Et si on redonnait le pouvoir à ceux dont c'est le métier ?

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Appel à contributions

Le cinéma français manque-t-il d’audace ? La mode est-elle de « ne faire naître que des oeuvrettes qui plairaient à tout le monde » ? Les producteurs et autres distributeurs doivent-ils réapprendre le goût du risque ? Doivent-ils produire moins, sinon mieux ? Passe-t-on à côté de jeunes talents par manque de cran ?
Bref, est-il grand temps de réveiller le cinéma français ? Lisez cet article et réagissez, votre avis nous intéresse : exprimez-vous, soit en commentaire ci-dessous, soit par mail (web@telerama.fr). Nous lirons attentivement vos réponses et vos impressions sur la production cinématographique actuelle.

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Tout le monde l'aime, le cinéma français. Et il le mérite. C'est l'un des meilleurs au monde : le seul à avoir réussi à prospérer en Europe, le seul à aider de grands auteurs étrangers. Nos salles sont belles, et les cinéphiles encore nombreux. De temps à autre, de formidables surprises surgissent : La Vie d'Adèle et L'Inconnu du lac, l'an dernier. Dans la cour, de Pierre Salvadori, et Eastern Boys, de Robin Campillo, tout récemment.

De temps à autre, oui, mais de moins en moins souvent. Chaque semaine sortent des nullités terrifiantes dont on se demande qui a pu les financer, qui a pu y croire rien qu'un instant. Ce n'est pas le nombre de films produits qui plombe le cinéma français, ni même le salaire, souvent exorbitant, de certaines stars vieillissantes, mais sa banalité. Son manque de feu… Polars à la traîne et comédies poussives, à peine écrites, à peine réalisées par des béni-oui-oui pour des producteurs en pleine panique, courant obstinément après le grand public, au risque, comme le disait jadis Max Ophüls, de « ne plus voir que son cul »…


Qualité France

On en est là. Pas très loin de la « qualité France » des années 50, ce cinéma tout à fait impuissant et asphyxié que fustigeait François Truffaut dans un article resté célèbre (1)… Vieux, vieux, qu'est-ce que ce cinéma fait vieux ! Quand on voit Avant l'hiver, de Philippe Claudel (qui n'est pas le pire des réalisateurs actuels !), on se dit qu'Henri Decoin aurait pu tourner, en mieux, le même film, il y a cinquante ans, avec Jean Gabin et Danielle Darrieux à la place de Daniel Auteuil et Kristin Scott Thomas. Et Georges Lautner aurait aussi bien réussi 96 Heures que Frédéric Schoendoerffer : on aurait eu droit à des dialogues de Michel Audiard – ce qui n'aurait pas nui…

Alors que des jeunes talents, il en existe. Plein. Le jury d'un concours de scénarios (2) a primé, il y a trois ans déjà, Le Secret des banquises, de Marie Madinier, une comédie originale, complètement loufoque, très Chérie, je me sens rajeunir, de Howard Hawks. Un producteur courageux rame désespérément pour le faire aboutir, mais comment se fait-il qu'un scénario aussi délicieux n'ait pas été soutenu par des chaînes de télé, des Sofica [Sociétés de financement de l'industrie cinématographique et de l'audiovisuel], les Régions ?… Trop risqué ? O.K. !

Voici un projet de polar qui connaît les mêmes difficultés. Appel d'air, d'Hadrien Bichet. Classique. Joliment écrit. Pas très difficile à caster. Du cousu main. Mais l'un des héros est un Noir. Un comité d'écriture demande à l'auteur d'expliquer pourquoi le Black a immigré. D'aller tourner ces scènes explicatives – bien inutiles à l'intrigue – dans le pays d'origine du personnage. De faire du Ken Loach, en quelque sorte. Une célèbre comédienne, membre d'une commission de financement, lui dit même : « Votre Black manque d'exotisme. » L'opinion de cette sotte l'emporte. Le projet capote…


Système grippé

Justement, ne pourrait-on pas les écarter, ces sots, de ces innombrables comités Théodule où ils règnent en maîtres pour mieux ratiboiser l'intelligence, ôter à chaque projet les aspérités qui en font le prix, réduire le cinéma, en fait, à des œuvres aussi molles que les montres de Dalí ?… C'est tout le système qui paraît grippé : l'Avance sur recettes, censée aider les cinéastes à préfinancer leurs films, semble ne prêter qu'à des potes ; les chaînes télé, muselées par la crise, musellent les talents. Et si l'un des responsables de Canal+ fait la grimace, fini le projet, mort et enterré, le cinéaste !

Alors, producteurs, distributeurs, décideurs, financiers de tout poil : réveillez-vous ! Gagnez beaucoup de fric, perdez-en un peu, mais prenez des risques : c'est votre métier, après tout, c'est dans votre ADN ! L'argent manque ? Eh bien, produisez moins, mais produisez mieux ! De l'audace, de l'audace et encore de l'audace ! Redevenez, tous, les découvreurs, les pisteurs que vous devez être. Il est tout de même aberrant que dans la France d'aujourd'hui, n'importe qui – romancier, chanteur, animateur – puisse réaliser un film. N'importe qui, sauf certains cinéastes doués. Redonnez le pouvoir à ceux dont c'est le métier. Misez sur le regard qu'ils posent sur le monde. A la longue, le talent paie plus que la facilité.


Soupe au navets

Certains me diront : « Prendre des risques ? Et pour quoi faire ? » C'est vrai, avec un scénario qui tient sur un timbre et une mise en scène invisible, Supercondriaque, de Dany Boon, a attiré plus de cinq millions de spectateurs. Pareil pour le très démago Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ?, de Philippe de Chauveron, près de cinq millions en trois semaines… Mais tant mieux ! Oui, tant mieux si Dany Boon, en jouant les Bourvil sans tendresse, enthousiasme les foules. Idem pour Christian Clavier, héros de Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ?, qu'on croyait définitivement out à force de bides… Les navets ont toujours existé. Dans les années 30, tandis que Drôle de drame, de Marcel Carné, se faisait insulter par ses rares spectateurs, c'est Bouboule Ier, roi nègre, de Léon Mathot, qui remplissait les salles. Et, quinze plus tard, Simone Signoret-Casque d'or faisait un bide colossal face à Martine Carol-Caroline chérie…

Que le navet soit ! Mais, si l'on ose dire, qu'il reste à sa place. Que les décideurs cessent de nous le servir à tous les repas. Car ce légume lasse, à la longue… C'est, peut-être, la grande idée à la mode qui plane, telle une menace : ne faire naître que des œuvrettes qui plairaient à tout le monde. Créer une sorte de cinéma eugéniste : des films millionnaires en spectateurs, tous lisses, neutres et identiques.

Pas question. Inventons. Provoquons. Résistons.


Par Pierre Murat


Source :
http://www.telerama.fr/

Article original :
http://www.telerama.fr/cinema/le-cinema ... EvS7O0I.01


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